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Une peine d’emprisonnement pour une mauvaise gestion des HUA. Vraiment ?

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Dans un établissement de restauration, la friture est une pratique courante — mais elle recèle aussi des risques s’il n’y a pas une gestion rigoureuse de l’huile. Au fil des utilisations, l’huile de friture se dégrade : l’oxydation, la lipolyse (l’eau provenant des aliments surgelés ou humides), l’élévation de la température, la présence de résidus alimentaires… tout cela accélère le vieillissement de l’huile. 

Cette dégradation entraîne :

  • la formation de composés polaires, ou de polymères de triglycérides, qui, lorsqu’ils dépassent certains seuils, rendent l’huile impropre à la consommation. 
  • un goût altéré pour les aliments frits (goût rance, friture molle)
  • un risque sanitaire accru (substances potentiellement nocives). 
  1. Bonnes pratiques à mettre en œuvre au quotidien

Pour maîtriser la qualité de l’huile de friture et prolonger son usage tout en restant conforme, voici les principaux leviers :

  • Bien choisir son huile

Sélectionner une huile adaptée à la friture (point de fumée suffisant, bonne stabilité thermique) est la première étape. 

  • Surveillance régulière

Même s’il n’y a pas de fréquence imposée, l’huile doit être contrôlée. Ce contrôle se fait selon plusieurs indicateurs de dégradation : taux de composés polaires, apparence visuelle (couleur foncée, mousse), odeur, …
Ces contrôles sont à réaliser avec un outil adapté :

  • Soit des bandelettes test
  • Soit des capteurs/sondes électroniques pour mesurer le pourcentage de composés polaires ou encore le pH. 
  • Filtration & température

Trois méthodes pour réduire la vitesse de vieillissement et limiter la présence de particules toxiques :

  • Filtrer l’huile après chaque utilisation pour éliminer les particules alimentaires qui accélèrent la dégradation 
  • Ne pas dépasser une température excessive : en général, rester sous 180 °C pour limiter la dégradation thermique. 
  • Éviter le mélange de produits (ex : produits frais/produits surgelés ou produits neutres (frites) avec produits panés (nuggets/tempura)

Focus Allergènes : La friture est souvent perçue comme une méthode « propre » puisque les aliments ne se touchent pas directement. Pourtant, l’huile constitue un véritable vecteur de contamination croisée.
Dans une friteuse où l’on prépare successivement ou simultanément différents aliments, les protéines allergènes peuvent :

  • diffuser dans l’huile,
  • se fixer sur les particules alimentaires carbonisées,
  • se déposer sur les aliments frits ensuite.

Ainsi, si un établissement frit dans la même cuve :

  • des beignets contenant du lait,
  • des produits à base de blé/gluten,
  • du poisson ou des produits contenant crustacés / mollusques,
  • des aliments à base d’arachides,

… il existe un risque réel de transfert allergénique, même si les produits ne sont pas en contact direct.

Il conviendra donc :
– de séparer les friteuses, lorsque cela est possible, pour limiter les risques (ex. : une cuve « frites » sans allergènes, une cuve « produits panés ») ;
– informer clairement le consommateur si une friteuse est utilisée pour plusieurs produits (le client allergique au gluten n’est pas censé se méfier des frites par exemple) ;

  • Stockage et remplacement
  • Stocker l’huile neuve à l’abri de la lumière et de l’air
  • Conserver les huiles usagées dans des bidons fermés.
  • Ne pas mélanger huile neuve et huile usagée : cela dégrade plus rapidement la qualité globale. 
  • Déterminer un rythme de changement selon usage, température, type d’aliments (panés, surgelés, etc.).
  • Inscription dans le PMS
  • Intégrer les vérifications et remplacements d’huile dans votre plan de maîtrise sanitaire (PMS) et dans les fiches autocontrôles HACCP.-
  • Conserver les justificatifs : dates de remplacement, taux contrôlés, type d’huile utilisée.
  1. Réglementation applicable en France

Voici les principales règles à connaître :

  • Qualité des huiles alimentaires

Le Décret n° 2008184 du 26 février 2008 fixe les conditions applicables aux graisses et huiles comestibles. 

Par exemple, l’article 8 du décret stipule que pour les huiles destinées à l’alimentation humaine, la teneur en composés polaires ne doit pas excéder 25 % et la teneur en polymères de triglycérides ne doit pas dépasser 14 %. 

L’étiquetage des huiles destinées à la friture doit mentionner « réservé à la friture » ou « réservé à la cuisson » et préciser éventuellement les conditions d’utilisation pour limiter la formation de composés chimiques indésirables. 

  • Gestion des huiles usagées

Les huiles de friture usagées sont qualifiées de déchets nécessitant une collecte / valorisation correcte

Il est INTERDIT : . 

  • de jeter ces huiles usagées dans les canalisations car elles risquent de figer en refroidissant et de boucher les conduits. 
  • de mélanger avec d’autres ordures ménagères 
  • de les déverser dans la nature : cette pratique est strictement interdite, peu importe le lieu car considérées comme POLLUANT. 

Depuis 2016, les producteurs d’huile usagée (à partir de 60 L/an) doivent faire appel à un prestataire agréé et conserver une traçabilité (bordereau de suivi, etc.). 

En restauration de proximité vous avez deux options :
– faire récupérer vos huiles usagées par un prestataire agréé.
– déposer vos huiles de fritures dans des bidons prévus à cet effet et les déposer en point de collecte agréé. 

  • Hygiène et restauration

Les établissements de restauration doivent respecter la réglementation d’hygiène alimentaire (le « paquet hygiène », codes alimentaires européens), ainsi que les obligations nationales : formation du personnel, plan HACCP, traçabilité, etc. 

  1. Sanctions encourues en cas de non-conformité

Le non-respect des obligations liées aux huiles de friture et à leur gestion peut entraîner des sanctions importantes.
Voici ce qu’il faut retenir :

En matière de qualité des huiles alimentaires : si une huile dépasse les seuils de composés polaires/polymères définis par le décret 2008-184 (25 %/14 %), elle est réputée impropre à la consommation.
Cela peut donner lieu à intervention des autorités sanitaires. 

En matière de gestion des huiles usagées : le non-respect (rejet dans les égouts, absence de collecte agréée, mélange de déchets) peut entraîner une amende pouvant aller jusqu’à 75 000 € et jusqu’à 2 ans d’emprisonnement dans les cas les plus graves

En matière d’hygiène alimentaire, pour un restaurant : en cas d’infraction aux règles d’hygiène, cela va de l’avertissement à l’amende, voire à la fermeture administrative de l’établissement.

Et rappelons-le, en pratique, pour un professionnel de la restauration, les conséquences d’un contrôle défavorable peuvent engendrer :

  • Coût financier immédiat (amende)
  • Perte de confiance des clients, atteinte à la réputation
  • Arrêt temporaire ou définitif de l’activité en cas d’infractions répétées ou graves (fermeture)

L’huile neutre de friture n’est dont pas si neutre si elle est mal utilisée. Risque de toxicité ou de contamination croisée constituent un risque sanitaire important, qui doit être :
– identifié,
– maîtrisé,
– expliqué au client,
et intégré dans votre PMS et dans vos process HACCP. 

Besoin d’un conseil, contactez-nous

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